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Comme chacun de nous Judas a plusieurs visages. L’évangile nous en présente trois, très différents l’un de l’autre, dans sa relation avec Jésus : Judas, traitre de Jésus; Judas, ami de Jésus; Judas, complice de Jésus. À vous de choisir celui que vous voulez retenir.
L’image la plus répandue de Judas, c’est celle du traître de Jésus. Le langage populaire a retenu cette image en traitant de Judas celui ou celle qui se montre coupable de trahison : tu es un vrai Judas, dira-t-on. Judas se révèle traitre quand il va chez les grands prêtres et leur dit : «Que voulez-vous me donner si je vous le livre?» Et l’évangéliste Matthieu ajoute que «depuis, Judas cherchait une occasion favorable pour le livrer» (26, 14-25).
Enfin, il passera à l’acte le jour où Jésus célèbre avec ses disciples le repas de la Pâque. Judas n’est pas le seul traître que l’évangile nous présente. Pierre lui-même n’a-t-il pas renié Jésus dans sa rencontre avec la servante qui l’interpellait sur ces liens avec Jésus?
Ce même Judas, on le voit tenir un rôle important au sein du groupe des apôtres. Il est le trésorier, c’est-à-dire celui qui gère la caisse commune. Cela suppose une relation privilégiée avec le maître qui a mis sa confiance en lui. Un autre passage de l’évangile de Matthieu pourrait nous suggérer que c’est lui qui réagit dans la scène qui se déroule à Béthanie où une femme verse sur la tête de Jésus un parfum de grand prix : «À quoi bon ce gaspillage ? On aurait pu en effet, vendre ce parfum pour beaucoup d’argent, que l’on aurait donné aux pauvres». N’est-ce pas une parole pleine de générosité que l’on peut attribuer au disciple qui gère la bourse commune? Voilà une autre image de Juda, celle d’un ami de Jésus!
Enfin, certains exégètes voient dans l’apparente trahison de Jésus une complicité de Judas avec son Maître. En poussant Jésus à se confronter aux grands prêtres, Judas aurait voulu amener ceux-ci à reconnaître en lui un homme spirituel, le messie attendu. Cette proximité, cette connivence de Judas avec Jésus expliquerait le privilège qu’il a eu de partager le même plat que Jésus et qu’il embrasse son maître en signe de respect de soutien.
En conclusion, je reviens à mes trois affirmations initiales en suggérant qu’il a peut-être été à la fois le traître, l’ami et le complice de Jésus. Notre propre relation à Jésus, dans notre vie quotidienne, ne présente-t-elle pas, elle aussi, divers visages?
À PROPOS D’YVON POMERLEAU
Après plus de trente ans comme missionnaire au Rwanda, où il a vécu la violence du génocide, et comme conseiller du Maître de l’Ordre des Prêcheurs à Rome, il a été prieur provincial des dominicains du Canada de 2002 à 2010. Aimant de la nature et de l’autre, Yvon participe, entre autres, à l’essor du Foyer du monde, une maison d’hébergement pour demandeurs d’asile et réfugiés à Montréal.
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